Les Échos du Logement n°124

09 PIERRE LACROIX TERRITOIRES RÉSILIENTS Conclusions Vous l’aurez compris : l’objectif de ces quelques pages n’est pas de prédire l’avenir mais bien d’aborder une diversité de thé- matiques de résilience dans un contexte d’effondrement possible. En quelque sorte, cet effondrement a déjà commencé avec le dépassement de nombreux points de rup- ture : climat, érosion de la biodiversité, pic pétrolier, fracture sociale…Comme le dit Den- nis Meadows 40 ans après le rapport du Club de Rome, «  il est trop tard pour le développe- ment durable, il faut se préparer aux chocs et construire dans l’urgence des petits systèmes résilients 22  ». Cette phrase porte en elle deux messages. Premièrement, le «développement durable» n’est plus possible depuis les an- nées 1970, période où nous avons dépassé les limites de biocapacité planétaire et sommes entrés en overshoot . Dès lors, parler de «développement durable» relève à la fois d’un oxymore et d’un danger. Aujourd’hui, ce concept récupéré et galvaudé est trop sou- vent un cheval de Troie peint en vert pour faire accepter une croissance à tout prix. Deuxièmement, si la perspective d’un effondrement implique des périodes tragiques et un brusque recul du niveau de vie, nous avons déjà intérêt à impulser des changements drastiques dans notre système actuel pour limiter les chocs à venir et prépa- rer cette transition. Une nouvelle société doit 22 D. Meadows, “Il est trop tard pour le développement du- rable”, in Agnès Sinaï (dir.), Penser la décroissance. Politiques de l’Athropocène, Les Presses de Sciences-Po, «Nouveaux Débats», 2013, p. 195-210. s’imposer, d’un système industriel mondialisé à une multitude de petits systèmes diversi- fiés, résilients, à ancrage local. Ces chan- gements émergent déjà avec une diversité d’innovations sociales qui doivent mainte- nant être reconnues et accompagnées par les pouvoirs publics, pour une transition à la fois bottom-up et top-down . De nombreuses actions concrètes sont à réaliser dès au- jourd’hui par les citoyens, les administrations, les professionnels de l’énergie, de l’alimen- tation, de l’aménagement du territoire…  23 Construire des sociétés résilientes passe par réduire notre dépendance aux énergies fos- siles et créer des petites entités autonomes organisées en réseau. Pour changer de société, il faut lancer de nouveaux paradigmes. Du high-tech vers le low-tech , du progrès matériel vers le pro- grès social, du productivisme vers la gouver- nance collective et locale… Et pour changer de paradigme, il faut se permettre d’explorer d’autres imaginaires. Quoi qu’il en soit, il ne faut pas que l’acceptation d’un effondrement nous em- pêche de tout faire pour éviter le pire. Cultiver une diversité d’imaginaires doit s’accompa- gner d’actions concrètes contre les rouages d’un système qui exploite Terre et Humanité. Conjuguer résilience et résistance pour nous survivre à nous-mêmes. Et si c’était ça, finalement, le grand défi du XXI e siècle qui nous permettrait d’habiter nos territoires demain? � 23 Les Verts – Alliance Libre Européenne (2013). Nourrir l’Europe en Temps de Crise. Vers des systèmes alimentaires résilients.

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