Les Échos du Logement n°124

35 BERNARD DEPREZ & ISABELLE PRIGNOT LABEL ECOQUARTIERS d’abandon de l’automobilité individuelle, d’intégration sociale, etc. Mais il ne faut pas compter sur un label pour nous y aider. Car si un label est utile pour objectiver et stabili- ser de nouvelles technologies, son problème est qu’il est paradoxalement aussi conser- vateur  12 . Les labels émanent des groupes industriels et représentent un consensus de marché pour innover… lentement. Trop len- tement, en tous cas, d’un point de vue scien- tifique  13 . Le concept de limites planétaires  14 et la critique historique contemporaine des pollutions  15 mettent en cause ce modèle industriel comme cause principale des bou- leversements climatiques beaucoup plus 12 Voir le dossier consacré à la question des labels dans la revue be.passive (05/2010, pp 43-52), www.bepassive.be. 13 Lire la lettre d’information n°10 (août 2018) de la pla- teforme wallonne du GIEC, consacrée à l’habitat : https :// plateforme-wallonne-giec.be/index.php?id=3. 14 Johan Rockström et al ., Planetary boundaries: exploring the safe operating space for humanity . 2009, Ecology and Society 14(2): 32. www.ecologyandsociety.org/vol14/iss2/ art32/; Will Stephen et al ., Planetary boundaries: Guiding human development on a changing planet , 2015, Science, Vol. 347, Issue 6223, 1259855. 15 François Jarrige, Thomas Le Roux, La Contamination dumonde: Une histoire des pollutions à l’âge industriel , Seuil, 2017 ; Christophe Bonneuil, Jean-Baptiste Fressoz, L’Événe- ment anthropocène: La Terre, l’histoire et nous , 2013, Seuil ; Jean-Baptiste Fressoz, L’Apocalypse joyeuse, une histoire du risque technologique , 2012, Seuil. que la consommation domestique  16 . Pour répondre utilement aux constats des cher- cheurs, il faudrait des ruptures plus fortes et aller plus vite que les labels… Or ce que le «marché» attend d’un écoquartier aujourd’hui, c’est trop souvent un simple lotissement verdurisé où des voi- tures hybrides roulent au pas. Si c’est ça qu’il faut labelliser, c’est complètement insuffi- sant et cela ne profite pratiquement qu’à ce marché (que faire avec les populations non solvables?). Un projet de quartier devrait au- jourd’hui poser la question de lamutualisation des infrastructures et du sol  17 pour rendre les prix/loyers abordables, abandonner la voiture individuelle, produire sa propre énergie et une partie de son alimentation, etc. ; la concep- tion devrait permettre de nouvelles formes de voisinage (intergénérationnel, colocation, handicap, solidarité, accueil de réfugiés, etc.) pour créer et renforcer des rapports sociaux résilients; la construction devrait être robuste mais low-tech et facile à adapter (y com- pris en termes d’usage), etc. Bref, il faudrait abandonner lemodèle de l’habitant-consom- mateur d’un quartier (même labellisé) pour imaginer celui d’habitants-coproducteurs de leur quartier, à l’instar des grands mouve- 16 Derrick Jensen, Forget Shorter Showers , https ://orion- magazine.org/article/forget-shorter-showers/ 17 https :/ /communitylandtrust.wordpress.com/ ments coopérateurs du passé et des projets les plus socialement innovants  18 aujourd’hui, comme les expériences d’habitat partagé Kraftwerk  19 ou Kalkbreite  20 en Suisse. Vu la frigidité du marché face à de tels projets, les propos un peu dépités que nous adressions à la RTBF signifiaient qu’il nous semble diffi- cile d’imaginer qu’un label puisse changer la donne… � 18 www.cid-grand-hornu.be/fr/expositions/Toge- ther__/230/; voir aussi www.habitat-groupe.be/ 19 Adrien Poullain, Choisir l’habitat partagé – L’aventure de Kraftwerk , 2018, éd. Parenthèses, Marseille. 20 Voir http :/ /plattform-genossenschaften.ch/ ; par exemple : www.metropolismag.com/cities/housing/kalk- breite-co-op-zurich-cooperative-renaissance/ � Ecoquartier BedZED à Londres, Bill Dunster architecte ©Jean-Michel Degraeve ECOLOGICAL FOOTPRINT (GHA) SUTTON BASELINE BEDZED AVERAGE BEDZED KEEN BEDZED SOCIAL BEDZED PRIVATE ONE PLANET LIVING BY 2050 Housing 1.33 0.77 0.42 0.77 0.77 Transport 0.66 0.75 0.37 0.50 0.98 Food 1.31 1.22 0.67 1.22 1.22 Consumer Items 0.79 0.79 0.43 0.79 0.79 Private Services 0.55 0.54 0.51 0.54 0.54 Public Services 0.37 0.37 0.37 0.37 0.37 Capital Investment 0.24 0.24 0.24 0.24 0.24 TOTAL 5.24 4.67 3.0 4.42 4.90 1.2 Planet equivalents 2.9 2.6 1.7 2.5 2.7 1 Reduction from baseline 11 % 43 % 16 % 7 % 66 % Carbon footprint (tonnes) 11.2 9.9 6 1.1 Reduction from baseline 12 % 46 % 90 % BEDZED – BILAN DE SEPT ANNÉES Extrait de BioRegional, BedZED seven years on, The impact of the UK’s best known eco-village and its residents, 2009.

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